Chablis: grands et premiers crus

Vaudésir: http://www.degustateurs.pro/article-climat-grand-cru-vaudesir-a-chablis-114761209.html

Petite question pour Patrick ... il me semble aujourd'hui que Les Clos, Valmur et potentiellement Preuses ont une aura supérieure à celle de Vaudésir. Comment expliquer cet état de fait?

Rien n'est plus élégant que ce vin lorsqu'il est à son meilleur et il rejoint en celà les suprêmes qualités des Genevrières et Chevalier plus au Sud en Côte d'Or. Le cru a de temps immémoriaux été considéré comme le plus abouti du chablisien car la maturité des baies n'était nulle part ailleurs plus aboutie et régulière qu'en ce secteur. Aujourd'hui il me paraît erroné d'affirmer que le réchauffement climatique lui a procuré une sorte d'exotisme récent qui le rendrait moins "minéral" que ses pairs. Au contraire c'est une zone qui ne libère jamais trop d'alcool naturel et qui préserve toujours une juste tension et une minéralité vraie qui donne un grain tactile plus affirmé aux vins. Cela ne gomme en rien sa fine sensation saline/iodée  qui constitue une sorte de "marqueur" identitaire pour les autres crus du chablisien. C'est à peine si Vaudésir possède un équilibre général plus marqué par la douceur. Je le tiens pour le plus abouti du Nord de la Bourgogne.

En effet, ces passages ont suscité la même question pour moi.

Aujourd'hui, ma compréhension était que ce cru est toujours considéré comme le plus délicat, mais pas nécessairement le plus abouti, du moins selon d'autres auteurs et critiques.

C'est aussi ce qu'on retrouve dans le livre de Coates également.

La Moutonne est le plus grand Chablis depuis plusieurs siècles. Les effets de mode actuels à relier à des producteurs exceptionnels n'ont aucune prise sur mes constats qui ne se veulent pas ceux d'un présent par essence éphémère. Par ailleurs le goût du moment n'est pas celui qui m'intéresse. Stylistiquement les grands Bourgogne - et donc Chablis - des années 1920 à 79 - étaient à bien des égares plus aboutis que ceux d'aujourd'hui. concentration, élevage, longévité... On ne sait plus les faire comme je les ai en tête.

Oui mais Patrick tu précises "car la maturité des baies n'était nulle part ailleurs plus aboutie et régulière qu'en ce secteur".

Est-ce vraiment le cas aujourd'hui? Si les autres crus arrivent aujourd'hui à telle maturité, ce n'est donc pas vraiment une question de mode.

" Aboutie et régulière " ne signifie pas plus que cela. Un climat qui assure quelle que soit l'année 13 degrés physiologiquement et phenoliquement mûr. L'endroit de Vaudésir est unique à ce point de vue. On oublie toujours que si la tension acide est constitutive du Chablis, la principale qualité de ses climats d'elite est d'être régulièrement mûrs.

Patrick Essa a écrit:Stylistiquement les grands Bourgogne - et donc Chablis - des années 1920 à 79 - étaient à bien des égares plus aboutis que ceux d'aujourd'hui. concentration, élevage, longévité... On ne sait plus les faire comme je les ai en tête.

C'est, curieusement, tout le contraire que j'ai entendu d'à peu près tous les producteurs lors de mon récent passage! Selon eux, les chablis n'ont jamais été aussi bons aujourd'hui! Merci au réchauffement climatique qui permet d'atteindre des meilleures maturités et aux avancées oenologiques/technologiques qui permettent une meilleure maîtrise. Les chablis des années 20-79 sont possiblement les pires...

En revanche, j'ai souvent entendu beauoup de bien de la Moutonne. Le 1966 dégusté était absolument renversant de jeunesse!

À peu près tous les producteurs d'aujourd'hui désherbent, mécanisent, vendanges machines, élèvent court en cuve et bouche Diam...ai je le droit d'imaginer que "leur" meilleur n'est pas celui auquel je rêve? Il ne faut pas se limiter aux dires, sinon...ce 66 n'aurait aucune raison d'être renversant. Le Bourgogne blanc sort à peine d'une crise majeure et l'on signifierait qu'il est à son Zenith? Dis moi Pat c'est un peu comme si je te disais que le Canadien a la meilleure équipe de son histoire en ce moment.

Ils t'ont donné le speech à la mode Patrick D.... Je pense que Patrick Essa parle d'autre chose ici, qu'il aura peut-être la gentillesse de détailler.

Par ailleurs, je serais vraiment surpris qu'un vigneron dise vraiment qu'une période de plus de 50 ans est la pire du chablisien. Cela suppose une connaissance au moins aussi grande des vins antérieurs...

Patrick Essa a écrit:À peu près tous les producteurs d'aujourd'hui désherbent, mécanisent, vendanges machines, élèvent court en cuve et bouche Diam...ai je le droit d'imaginer que "leur" meilleur n'est pas celui auquel je rêve? Il ne faut pas se limiter aux dires, sinon...ce 66 n'aurait aucune raison d'être renversant. Le Bourgogne blanc sort à peine d'une crise majeure et l'on signifierait qu'il est à son Zenith? Dis moi Pat c'est un peu comme si je te disais que le Canadien a la meilleure équipe de son histoire en ce moment.

Je suis bien d'accord avec toi: il y a lieu de prendre avec circonspection ce que l'on raconte aux journalistes! Je ne fais que rapporter les faits. Sur la presque trentaine de producteurs que j'ai rencontré à Chablis, rares sont ceux qui n'ont pas fait mention des atrocités liées au gel et autres utilisation de fournaise au diesel des années 20-70. Sans parler de la "révolution" diam.

Bref, le contraste entre les deux discours reste pour le moins frappant.

Voilà longtemps que je me documente sur Chablis et je considère que comme dans de nombreux autres vignobles bourguignons la légende des siècles côtoie les fables du présent pour en faire emerger une image policée au fond très mercantile. Au detour de chaque article de fond pointe les mots clefs " fondamentaux ": moine, Pontigny, Kimmeridgien, Moutonne,serein, cuve, clair, minéral...un fond de commerce bien simpliste!
Chablis et son vin c'est une histoire infiniment plus complexe que je suis entrain de mettre en forme depuis quelques jours et que je publierai plus tard sur DP. Je puis toutefois signifier qu'il sera avant tout question des potentialités de ce vignoble hors classe.

Patrick, Chablis mesurait moins de 500 hectares quand le gel de 56 à TOUT détruit ou presque. En 1960 et 1970 la plupart des vignes avaient moins de 15 ans Il a fallu attendre les années 78/86 pour voir véritablement exploser les plantations et la définition des premiers crus.   De ce fait même les grands vins étaient produits par quelques grandes familles seulement et uniquement sur les crus d'élite. Les jus provenant du "beaunois" titraient moins mais provenaient de vignes travaillées, moins chargées, élevées souvent en feuillettes, pressées au verticale, élever sans levurage, sans enzymatique... seul le sucre pénétrait les cuveries. Les vignerons sages le savent bien.Par ailleurs le diam est une anecdote, rien de plus.

Voilà Les Clos: http://www.degustateurs.pro/article-climat-grand-cru-les-clos-a-chablis-114761119.html

Je comprends donc de tes deux billets que le fait que Clos soit aujourd'hui plus réputé que Vaudésir tient du fait que les deux "meilleurs" domaines de Chablis (Dauvissat et Raveneau) en produisent, ce qui n'est pas le cas pour Vaudésir.

Pourtant, Droin produit du Vaudésir

Non Vincent ce résumé de la situation est un peu trop rapide. La grandeur d'un blanc est en premier lieu sa finesse associée à la concentration. Je pense sincèrement que le potentiel de Vaudésir est de ce point de vie supérieur.

 Je suis loin d'avoir compris complètement sa vinification mais ce que j'observe depuis deux ans me conduit véritablement à le maximiser face aux autres. Quel potentiel incroyable! Je monte chaque année déguster la production des crus pour BA depuis plus de 12 ans et si ce cru ne sort pas forcément au niveau des résultats "au dessus" je le perçois comme le meilleur intrinsèquement pour son raffinement. Rien ne me paraît plus important pour un Chablis si l'on fait abstraction d'un contexte actuel peu porté à une juste évaluation des blancs.

Le meilleur vin de Droin est son Grenouillles depuis plus de 20 ans...comme le Preuse est celui de Dauvissat.

Patrick Essa a écrit:
Le meilleur vin de Droin est son Grenouillles depuis plus de 20 ans...
.....comme le Preuse est celui de Dauvissat.

Vraiment en accord avec toi Patrick
.....comme celui de Raveneau est Valmur....à mon avis
.....comme Bouches-Chères chez Essa-Buisson-Charles........

On est toujours mauvais juge de ses vins je crois. Mais tu es en phase avec la moitié de mes clients, l'autre préférant Goutte d'Or. Moi je suis fan de mon Aligoté!

Je vais partie de l'autre moitié ... j'ai bien de la misère à résister à la puissance et au spectre aromatique de Goutte d'Or!

Voilà les Grenouilles: http://www.degustateurs.pro/article-climat-grand-cru-grenouilles-a-chablis-114761155.html

Patrick Essa a écrit:On est toujours mauvais juge de ses vins je crois. Mais tu es en phase avec la moitié de mes clients, l'autre préférant Goutte d'Or. Moi je suis fan de mon Aligoté!

Grand fan aussi la famille Therrien....le vin de Tamara!
Bien hâte de voir le 2012 au Qc......arrivera-t-il avant l'hiver?

L'Aligoté 2012 devrait être mis en marché au Qc vers la fin Janvier. La SAQ vient tout juste d'émettre le bon de commande pour 600 bouteilles...

Patrick s'attaque aux premiers crus ... Lys et Vaillons: http://www.degustateurs.pro/article-chablis-premier-cru-la-cote-des-vaillons-et-des-lys-124712692.html

Je commence par ces premiers crus tout en vinifiant depuis ce millésime une petite cuvée de Lys...

Patrick, que penses-tu de Fourchaume? Je le trouve souvent supérieur à Vaillons.

C'est un excellent premier cru typé rive droite et effectivement il est plus connu et reconnu. Mais je préfère les envisager pour ce qu'ils ont à offrir de singulier et avec le temps j'ai appris à négliger les classements. Mais tu as bon goût car la Fourchaume donne des vins très sensuels.

Merci Patrick!