Chablis 2015

Ayant goûté qu'à deux Chablis du millésime 2015, je me questionne si d'autres membres du forum ont constaté un manque d'acidité dans ce millésime comme je le perçois ?

Oui. Mais.

Les vins tardifs comme les Villages (surtout ceux élevés en cuves) et les premiers crus d'exposition sud-ouest et en élévation risquent d'être friands. Je m'en suis tapé 2-3 et c'est vraiment intéressant. Encore plus pour initier quelqu'un à Chablis.

Cela dit, ceux qui pensent que "équilibre" veut nécessairement dire "acidité" risquent d'être déçus. Il existe une fraîcheur qui provient de la minéralité chablisienne. Les meilleurs producteurs vont nous épater en ce domaine.

Il y a aussi ceux touchés par la grêle juste avant vendange. Alors là, je ne crois pas qu'un goût de "grêle" serait perceptible du tout. La pluie qui a suivi la grêle aura été bénéfique pour mieux équilibrer la baie de raisin en eau.

Comme pour 2009, 2015 ne sera pas classique. Mais je suis fortement optimiste. J'accepte que tous les millésimes soient différents et que les bons vignerons feront des vins qui les reflètent.

Ian Champagne a écrit:

Comme pour 2009, 2015 ne sera pas classique........ J'accepte que tous les millésimes soient différents et que les bons vignerons feront des vins qui les reflètent.

Tellement d'accord!

Michel Therrien a écrit:

Ian Champagne a écrit:

Comme pour 2009, 2015 ne sera pas classique........ J'accepte que tous les millésimes soient différents et que les bons vignerons feront des vins qui les reflètent.

Tellement d'accord!

D'accord également. Je trouve particulièrement intéressant des années chaudes sur des terroirs froids, ce qui peut permettre, par exemple, de découvrir une richesse de fruit souvent absente dans les chablis. Et ce nouveau "gras" ne compromet pas nécessairement la qualité de l'ensemble. Tant qu'une certaine acidité se maintient, l'équilibre y sera ; ce ne sera peut-être pas "typique", mais ce sera certainement délicieux et intéressant, en tout cas avec les meilleurs producteurs. La mode actuelle favorise l'acidité, la minéralité, etc., mais c'est souvent au détriment de l'expression de la pureté primaire du fruit mûr. C'est vrai qu'il y a eu il y a quelques années une tendance vers la surmaturité (et des élevages trop appuyés), mais penser que l'inverse est nécessairement signe de qualité, c'est une vision biaisée il me semble. Trop penser en terme de typicité est également un piège, dans la mesure où cela empêche d'apprécier des vins sans doute moins représentatifs, mais souvent d'une singularité magnifique. C'est aussi le piège d'un système d’appellation contrôlée parfois trop rigide, incapable de reconnaître l'excellente parce qu'on sort un peu trop des standards de l’appellation.

Je partage l'avis de Ian.

J'ai visité Moreau et Picq et franchement j'ai été agréablement surpris par la qualité des vins, que j'attendais un peu mous. Il n'en est rien. C'est moins tranchant que 2014 bien sûr, mais c'est quand même minéral, on n'est pas dans l'exotisme des années trop mûres. Je crois que ce sera largement supérieur à 2009 et 2013, deux autres années chaudes moins classiques.

En fait, Neal Martin écrivait ceci sur les 2015 de Picq:

But certainly brothers Didier and Pascal are masters of their craft. “I started the 2015 harvest on September 9 and finished on September 15,” Didier told me. “The wines went through 100% malolactic and with no acidification. The alcohol came in at around 13% with pH levels around 3.30. I think it is a vintage for the long term and so I have bottled a lot of magnum, even though there is less acidity than in 2014. There is very good structure in the wines. The problem is that they are already very pleasant to drink!” You know, when Gilbert enthused about the 2015s and basically placed them on the same level as the 2014, I was skeptical. In all of my previous tastings, the 2014 was clearly ahead. But once I commenced tasting the wines, I could see exactly where he was coming from and this was one of the few growers whose 2015s equal, and might even surpass, the previous vintage. You would not expect that because the warmth of that growing season would not necessarily have played into their hands. What they have achieved is to pierce their 2015s with superb acidity and tension, much more Zen-like than many others that I tasted, to the point where you might be hard pressed guessing whether the wine was 2014 or 2015.

Didier disait ne jamais avoir vu de tels équilibres dans ses vins. Son Dessus la Carrière 2015 est peut-être le meilleur villages que j'ai pris.

Les crus de Fabien Moreau étaient aussi très beaux, ce sera dans mes prochains cr de voyage.

Neal:

Like many winemakers who were suffering at the hands of hail and frost, Moreau was ruing the fact that there will be no Chablis Village in 2016, decimated by hail. "And now there is massive mildew pressure and because we are certified organic, it is more of a challenge. You have to do the work before the problem hits, but the [constant] rain stops us from doing this." Still, at least there is 2014 and 2015. "I think that there is more classic flavor in 2015 than 2013. They are bigger wines than 2014. I conducted a shorter ageing in barrel than in 2014, as I was worried about the influence of the oak, around nine months instead of 14 months. I didn't keep too much lees, as some of the Grand Crus had been touched by hail. The Chablis les Clos went through a longer malolactic than others." I wanted to know a little more about the harvest for the 2015s. "Due to the hail on September 1, we started picking the day after. We picked all of Les Clos, Clos des Hospices, Blanchots and Chablis first over 2.5 days and then we waited, because there had been so much rain. Some of the berries had doubled in size, so we needed more concentration."

Alexandre Trudel a écrit:La mode actuelle favorise l'acidité, la minéralité, etc., mais c'est souvent au détriment de l'expression de la pureté primaire du fruit mûr. C'est vrai qu'il y a eu il y a quelques années une tendance vers la surmaturité (et des élevages trop appuyés), mais penser que l'inverse est nécessairement signe de qualité, c'est une vision biaisée il me semble. Trop penser en terme de typicité est également un piège, dans la mesure où cela empêche d'apprécier des vins sans doute moins représentatifs, mais souvent d'une singularité magnifique. C'est aussi le piège d'un système d’appellation contrôlée parfois trop rigide, incapable de reconnaître l'excellente parce qu'on sort un peu trop des standards de l’appellation.

  Des propos d'une extrême justesse Alexandre. Il ne devrait pas y avoir de modes car celles-ci ne sont que l'expression de ce que l'homme imprime à ses fruits. Chaque année est différente et doit s'exprimer pleinement. L'élevage n'est là que pour sublimer les matières en préservant pureté et équilibre d'un millésime qui a un caractère "climatique" propre. Ces vins doivent être appréhendés ensuite sur leur plateau de maturité pour observer leurs réelles qualités associées aux terroirs qui les ont porté.
  Le Chablis d'avant le gel des années 50 etait un vin dont les fruits étaient récoltés à la main élèvés longuement et débités en feuillettes de 132 litres, l'ère moderne et les vignerons d'aujourd'hui en font majoritairement un vin où les machines récoltent les raisins vinifiés et élevés "court" dans de grandes cuves inox...où est la vérité du terroir?
 Eh bien c'est assez simple, un vin abouti où l'élevage ne transparaît plus. Point de réduction de cuve ou de vieux bois, point de traces lactiques, point de senteurs grillées ou boisées, point de nez iodé excessif ou de traces vertes, point de dilution et point d'acidité de raisins triturés et pas mûrs.
 Il faut être capable d'ouvrir son esprit et de deguster ce merveilleux crus du Nord avec l'envie d'en percevoir l'essence. Sa maturité froide aboutie, ses accents nobles de Mousserons, cette fine sensation saline qui étire la finale et cette absolue nécessité de ne pas être impactée par des effluves citronnées qui signent les dosages en So2 trop élevées, bref, du Chablis de toujours. Celui qui me fait vibrer.

En tout cas, les Chablis 2015 font bonne figure chez Decanter - parmi les plus grands vins du millésime côte-côte avec les Montrachet et cie...

Raveneau et Dauvissat oui, mais aussi Christian Moreau, Fèvre, Laroche.

http://www.decanter.com/learn/vintage-guides/en-primeur/burgundy-en-primeur/burgundy-en-primeur-2015/top-burgundy-2015-white-wines-354158/?utm_source=facebook.com&utm_medium=referral

Ici, leur panel des meilleurs Chablis 2015:

http://www.decanter.com/learn/vintage-guides/en-primeur/burgundy-en-primeur/burgundy-en-primeur-2015/best-chablis-2015-wines-354175/

Merci Stéphanie, je suis bien content pour le sympathique et talentueux Fabien Moreau. Cool que ce soit gratuit en ligne le Decanter.

Qui importe Moreau au Québec?

Simon Grenier a écrit:Qui importe Moreau au Québec?

ABC

Le premier cru Vaillon de Moreau 2015 est arrivé (notez l'absence de "s" sur sa cuvée), il y avait même quelques magnums mais pas sûr s'il en reste.

Decanter le note bien aussi :

http://www.decanter.com/wine-reviews/france/chablis/christian-moreau-chablis-vaillons-1er-cru-chablis-2015-8950

Je ferai signe quand les grands crus arriveront.

Je viens de boire le Vaillon 2015 de Christian Moreau.
Ça rejoins tout-à-fait le discours ci-haut: une belle texture, beaucoup d'arômes de fruits mais peu d'acidité.
Par contre, ma préférence pour la fraîcheur m'oriente à le servir plus froid que je ne le ferais avec un millésime comme 2011 ou 2014 - chacun ses goûts.

En général, comment les voyez-vous évoluer avec le temps ces 2015?  Je pose la question vu que je n'ai pas beaucoup d'expérience avec la garde encore...  Oui oui, je suis si jeune (dans le monde du vin, mais on peut oublier ce commentaire entre parenthèses  )!

Coïncidence, j'ai goûté à nouveau au Vaillon hier. Il était ouvert depuis le matin et avait facilement tenu jusqu'au soir, puis aujourd'hui . Ça peut facilement vieillir, mais je le trouve parfaitement à point en l'état, je les boirai dans l'année car ils donnent beaucoup de plaisir. 

Je crois toutefois que les 2015 vieilliront bien. Pas autant que les 2014, mais davantage que 2011 ou 2013.