Trois vins parfaits...
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Vincent Messier-Lemoyne
Olivier Collin
6 participants
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Trois vins parfaits...
Dans le contexte d'une dégustation techniquement plus difficile que prévue - verticale de Janasse CHaupin et Vieilles Vignes - ce fut un grand bonheur de voir se dessiner un trio à la fois hétéroclite et parfait. Cette vague impression sur mon palais et mes méninges le jeudi soir m'aura été confirmée le lendemain soir alors que je re-dégustai méthodiquement plusieurs des vins ainsi que le surlendemain : quand les vins sont encore plus grands 24 ou 48 heures après ouverture, on se sent plus en confiance pour prononcer ce mot, parfait, qui est si facilement attaqué et devrait être utilisé avec la plus grande circonspection.
Le vin le plus évident du trio fut sans conteste le Janasse Vieilles Vignes 2010. Son style luxuriant, archi-séduisant mais équilibré par les bonnes grâces du millésime 2010 ne peut laisser aucun doute au dégustateur : c'est un très grand vin. D'une couleur très foncée pour un vin castelneuvois à forte dominante de grenache, la robe est très jeune, visqueuse à souhait, et d'une parfaite limpidité. Le nez a cette qualité d'aller dans des registres forts différents : les raisins longuement mûris sans être passés au-delà du seuil critique annonçant la surmaturité donnent un profil de base axé sur la mûre avec une pointe mentholée amenant de la fraîcheur, l'élevage parfaitement maîtrisé fait ressortir des notes bien dosées de vanille en gousse qui rehaussent une typique présence de potpourri provençal. Ceci annonce un vin moderne, ce qui n'est pas ma vision préférée à Châteauneuf mais il me faut bien reconnaître que c'est parfaitement réussi comme équilibre aromatique. Au palais, le grand vin s'impose dès la première gorgée. Non seulement est-ce à la fois très riche et précis, mais les tanins abondants sont parfaitement intégrés, combinés à une belle acidité rendant à ce vin une grâce inespérée étant donné le style de base et sa richesse en alcool. L'élément le plus magnifique mais également un brin caché à ce stade est la finale marquée par une fine minéralité de type charbon, assez rare en terre castelpapale, qui amène une touche plus sérieuse à un vin foncièrement hédoniste en première approche. Alors que d'autres vins du domaine semblent un peu forcés, ce 2010 atteint le summum dans le genre et c'est une rare occasion d'écrire 100pts.
Le vin au chemin le plus tortueux vers la perfection, et c'est souvent le cas pour cette cuvée, fut l'Hommage à Jacques Perrin 2009. Ce n'est que le lendemain, après un contact important avec l'air ambiant, qu'il a complètement exprimé son potentiel. Si 2009 est un millésime bien solaire sur les vins à dominante de grenache, ce vin est clairement marqué par le côté ésotérique du mourvèdre. Une couleur très profonde, reflets presque noirs, une texture plus grasse qu'à l'habitude trahit les 15% de ce vin. Les nez est introspectif pendant un long moment : prune fraîche, graphite, côté salin/iodé de coquillage, quelques notes plus florales de violette. C'est très profond comme nez, mais ça n'explose pas du verre au contraire du vin précédent. La stabilité aromatique du vin est une merveille et 48 heures d'air ne l'ont pas entamée, ce qui est un gage d'un cycle de vie extrêmement long. Au palais le vin a plus de distinction que le Janasse et je me suis fait prendre à l'aveugle sur une syrah d'Hermitage d'un millésime très mûr. On admire le poids et l'onctuosité contenue de ce vin, les tanins sont plus doux que sur de nombreux millésimes de cette cuvée, donnant une impression de plénitude qui contraste avec le nez de vin de très longue garde. On sent dans ce vin que François Perrin est amateur de vins aux styles très différents, la retenue du grand vin est ici palpable comme rarement à Châteauneuf. En finale le vin se resserre, pour nous rappeler que ce ne sera qu'après une bonne vingtaine d'années que ce bijou sera vraiment à point. Il y a du mystère dans ce vin, mais c'est un autre 100pts.
Un vin arrivant à peine à son plateau de maturité, La Landonne 1998 de Marcel et Philippe Guigal a fièrement exhibé sa réputation d'être le vin le plus bordelais du trio LaLaLa, encore plus qu'à l'habitude peut-être… Le millésime 1998 n'en fut pas un d'opulence et à 15 ans d'âge on a ici un vin dont la patte Guigal sur l'élevage s'est dissipée complètement, laissant s'exprimer sans retenue la grande syrah d'un terroir de schiste riche en fer. Essayant de m'imaginer ce vin à l'aveugle, j'ai pour la première fois fait un parallèle avec le Clos Rougeard plutôt que la plus traditionnelle association bordelaise. Le lendemain de l'ouverture, l'expression variétale est plus marquée : les notes de viande fumée, un fruité de cassis mûr très fin ainsi qu'une touche proche de l'écorce d'arbre (rappelant que ce vin n'est pas éraflé) forment l'assise aromatique d'un vin à la palette si vaste que ce serait lassant d'écrire et de lire… . de la distinction pure dans ce bouquet que l'on ne se lasse pas de humer. Au palais, on est sur un équilibre qui tranche radicalement avec les deux vins précédents, attaque fine, peu ample mais savoureuse et une dimension que l'on prend un certain temps à percevoir. Mais le milieu de bouche est magistral de densité, de tension sans accroc, de finesse d'un vin arrivant lentement à maturité, La finale est de loin la plus parfumée des trois vins, avec ce côté sans effort et distingué, pour lequel les italiens ont un mot qui leur est propre : la sprezzatura. Il y a plus de vin dans les derniers 30ml de cette quille que dans presque tout ce que j'ai ouvert de ma cave depuis quelques mois. Mon préféré du trio de vins qui m'ont semblé, chacun à sa façon, atteindre un idéal du vin.
Le vin le plus évident du trio fut sans conteste le Janasse Vieilles Vignes 2010. Son style luxuriant, archi-séduisant mais équilibré par les bonnes grâces du millésime 2010 ne peut laisser aucun doute au dégustateur : c'est un très grand vin. D'une couleur très foncée pour un vin castelneuvois à forte dominante de grenache, la robe est très jeune, visqueuse à souhait, et d'une parfaite limpidité. Le nez a cette qualité d'aller dans des registres forts différents : les raisins longuement mûris sans être passés au-delà du seuil critique annonçant la surmaturité donnent un profil de base axé sur la mûre avec une pointe mentholée amenant de la fraîcheur, l'élevage parfaitement maîtrisé fait ressortir des notes bien dosées de vanille en gousse qui rehaussent une typique présence de potpourri provençal. Ceci annonce un vin moderne, ce qui n'est pas ma vision préférée à Châteauneuf mais il me faut bien reconnaître que c'est parfaitement réussi comme équilibre aromatique. Au palais, le grand vin s'impose dès la première gorgée. Non seulement est-ce à la fois très riche et précis, mais les tanins abondants sont parfaitement intégrés, combinés à une belle acidité rendant à ce vin une grâce inespérée étant donné le style de base et sa richesse en alcool. L'élément le plus magnifique mais également un brin caché à ce stade est la finale marquée par une fine minéralité de type charbon, assez rare en terre castelpapale, qui amène une touche plus sérieuse à un vin foncièrement hédoniste en première approche. Alors que d'autres vins du domaine semblent un peu forcés, ce 2010 atteint le summum dans le genre et c'est une rare occasion d'écrire 100pts.
Le vin au chemin le plus tortueux vers la perfection, et c'est souvent le cas pour cette cuvée, fut l'Hommage à Jacques Perrin 2009. Ce n'est que le lendemain, après un contact important avec l'air ambiant, qu'il a complètement exprimé son potentiel. Si 2009 est un millésime bien solaire sur les vins à dominante de grenache, ce vin est clairement marqué par le côté ésotérique du mourvèdre. Une couleur très profonde, reflets presque noirs, une texture plus grasse qu'à l'habitude trahit les 15% de ce vin. Les nez est introspectif pendant un long moment : prune fraîche, graphite, côté salin/iodé de coquillage, quelques notes plus florales de violette. C'est très profond comme nez, mais ça n'explose pas du verre au contraire du vin précédent. La stabilité aromatique du vin est une merveille et 48 heures d'air ne l'ont pas entamée, ce qui est un gage d'un cycle de vie extrêmement long. Au palais le vin a plus de distinction que le Janasse et je me suis fait prendre à l'aveugle sur une syrah d'Hermitage d'un millésime très mûr. On admire le poids et l'onctuosité contenue de ce vin, les tanins sont plus doux que sur de nombreux millésimes de cette cuvée, donnant une impression de plénitude qui contraste avec le nez de vin de très longue garde. On sent dans ce vin que François Perrin est amateur de vins aux styles très différents, la retenue du grand vin est ici palpable comme rarement à Châteauneuf. En finale le vin se resserre, pour nous rappeler que ce ne sera qu'après une bonne vingtaine d'années que ce bijou sera vraiment à point. Il y a du mystère dans ce vin, mais c'est un autre 100pts.
Un vin arrivant à peine à son plateau de maturité, La Landonne 1998 de Marcel et Philippe Guigal a fièrement exhibé sa réputation d'être le vin le plus bordelais du trio LaLaLa, encore plus qu'à l'habitude peut-être… Le millésime 1998 n'en fut pas un d'opulence et à 15 ans d'âge on a ici un vin dont la patte Guigal sur l'élevage s'est dissipée complètement, laissant s'exprimer sans retenue la grande syrah d'un terroir de schiste riche en fer. Essayant de m'imaginer ce vin à l'aveugle, j'ai pour la première fois fait un parallèle avec le Clos Rougeard plutôt que la plus traditionnelle association bordelaise. Le lendemain de l'ouverture, l'expression variétale est plus marquée : les notes de viande fumée, un fruité de cassis mûr très fin ainsi qu'une touche proche de l'écorce d'arbre (rappelant que ce vin n'est pas éraflé) forment l'assise aromatique d'un vin à la palette si vaste que ce serait lassant d'écrire et de lire… . de la distinction pure dans ce bouquet que l'on ne se lasse pas de humer. Au palais, on est sur un équilibre qui tranche radicalement avec les deux vins précédents, attaque fine, peu ample mais savoureuse et une dimension que l'on prend un certain temps à percevoir. Mais le milieu de bouche est magistral de densité, de tension sans accroc, de finesse d'un vin arrivant lentement à maturité, La finale est de loin la plus parfumée des trois vins, avec ce côté sans effort et distingué, pour lequel les italiens ont un mot qui leur est propre : la sprezzatura. Il y a plus de vin dans les derniers 30ml de cette quille que dans presque tout ce que j'ai ouvert de ma cave depuis quelques mois. Mon préféré du trio de vins qui m'ont semblé, chacun à sa façon, atteindre un idéal du vin.
Dernière édition par Olivier Collin le Lun 3 Fév 2014 - 11:46, édité 1 fois (Raison : orthographe)
Olivier Collin- Messages : 2477
Date d'inscription : 03/06/2009
Re: Trois vins parfaits...
Merci pour ce CR inspirant Olivier. C'est un réel bonheur de te lire.
_________________
"Mes goûts sont simples, je me contente aisément de ce qu'il y a de meilleur" - Winston Churchill
Vincent Messier-Lemoyne- Messages : 8731
Date d'inscription : 12/05/2009
Age : 40
Localisation : Montréal
Re: Trois vins parfaits...
En dégustant le Landonne 1998 et après avoir erré à l'aveugle sur Bordeaux avec le comparse Yves, j'ai pensé à la Loire et au Clos Rougeard à cause du petit côté vert présent dans le vin et le grande finesse de l'ensemble. Intéressant que tu y fasses référence également. Un vin très complexe au plan aromatique, soyeux et d'une grande finesse en bouche. Il faut y porter attention car il ne s'impose pas par sa richesse et structure. 97
Le HJP 2009 était franchement impressionnant dès l'ouverture. Un vin qui détonne parmi les grands Châteauneuf 2009 avec sa dominante Mourvèdre. Structuré, épicé, texturé, d'une complexité unique parmi ce que j'ai bu en 2009. 99
Janasse VV 2010 que j'ai trouvé franchement le plus complet de la série et le plus équilibré. Tout y est: structure, concentration, fraîcheur, longueur... L'équilibre d'un grand vin dans un grand millésime. Bien content d'avoir fait provision... 98
J'ai ramassé un fond (demi-verre) du Janasse VV 2001 pour le lendemain, le vin était encore très beau et n'avait pas perdu de plume. Je crois que ça démontre bien l'intérêt de ce vin à la garde.
Le HJP 2009 était franchement impressionnant dès l'ouverture. Un vin qui détonne parmi les grands Châteauneuf 2009 avec sa dominante Mourvèdre. Structuré, épicé, texturé, d'une complexité unique parmi ce que j'ai bu en 2009. 99
Janasse VV 2010 que j'ai trouvé franchement le plus complet de la série et le plus équilibré. Tout y est: structure, concentration, fraîcheur, longueur... L'équilibre d'un grand vin dans un grand millésime. Bien content d'avoir fait provision... 98
J'ai ramassé un fond (demi-verre) du Janasse VV 2001 pour le lendemain, le vin était encore très beau et n'avait pas perdu de plume. Je crois que ça démontre bien l'intérêt de ce vin à la garde.
Ludwig Desjardins- Messages : 5774
Date d'inscription : 05/06/2009
Localisation : Montréal
Re: Trois vins parfaits...
Belle lecture merci, moi qui n'est pas grand fan de chateauneuf, spécialement moderne, ca donne le goût de donné une chance à cette Janasse...!
Marc-Olivier Vaillancourt- Messages : 214
Date d'inscription : 23/09/2012
Re: Trois vins parfaits...
Combien d'années à attendre pour mon HJP 2005 selon vous ?!
Julien Delisle- Messages : 196
Date d'inscription : 30/06/2009
Re: Trois vins parfaits...
Julien Delisle a écrit:Combien d'années à attendre pour mon HJP 2005 selon vous ?!
Une dizaine d'années lui seront bénéfique, et il pourra sans problème être cinquantenaire!
Le C9P peut bien vieillir, surtout ce genre de bouteille. J'ai apporté un Barbe Rac 1990 lors de cette dégustation, et certains pensaient à un vin de 2006!
Ludwig Desjardins- Messages : 5774
Date d'inscription : 05/06/2009
Localisation : Montréal
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